La Suisse à VTT: étapes 5 et 6
Jeudi 4 mai 2017: Centre Hospitalier Universitaire Vaudois, consultation de chirurgie de la main
Le but de ce périple est de vivre une aventure incroyable mais aussi d’attirer le regard de la population sur les maladies invisibles et les préjugés que l’on peut avoir à propos de la maladie et du handicap. C’est pourquoi je partage les bons comme les mauvais moments, et si mes aventures de folie sont possibles, c’est aussi grâce à toute l’équipe médicale qui est derrière !
Avec le VTT, les chocs dans les mains et les longues descentes ont mis à rude épreuve mes doigts qui commencent à me faire bien mal et à m’empêcher d’écrire correctement longtemps et se luxent sans raison. De plus, j’ai depuis plusieurs mois une perte de force dans la main droite à laquelle je n’ai pas fait attention. Ma rhumatologue m’a donc envoyée vers un chirurgien de la main pour qu’il examine tout cela. Il me fait faire plein de tests et le manque important de force dans ma main droite est évident: cela provient sans doute du nerf qui passe entre ma main et le coude et qui s’irrite à chaque fois que j’ai le bras plié. En effet, je ne peux pas plier le bras sans que l’articulation ne se subluxe (elle sort de son axe), et le nerf n’apprécie pas trop d’être pincé, d’où ma perte de force. Je dois désormais éviter d’avoir le bras plié et dormir avec un linge (serviette pour les Français) enroulé et entouré de ruban adhésif autour de mon bras droit, qui l’empêche de se plier.
Je suis ensuite invitée à aller en ergothérapie où ils me donnent des sortes de petites attelles qui s’appellent les anneaux de Murphy. Elles empêchent mes doigts, de par leur hyperlaxité, de se plier à l’envers et vont donc grandement participer à diminuer mes douleurs. Je reçois aussi une petite balle pour faire des exercices de renforcement musculaire des mains
Me voilà prête à repartir pour de nouvelles aventures!
Seul petit souci… le linge autour de mon bras droit m’empêche de plier le bras, ce qui me perturbe et me donnera quelques nuits très très courtes…
Dimanche 7 mai 2017: 56 kilomètres, 1570m D+
Je me lève à 5h après deux heures de sommeil uniquement (voir au-dessus). Je pédale jusqu’à la gare et embarque dans le train qui m’amène à l’autre bout de la Suisse. Quatre heures plus tard, me voici à Rorschach, au bord du lac de Constance à l’extrême nord des Alpes suisses.
La première difficulté consiste à trouver le départ de l’itinéraire car je ne trouve pas de panneau ayant le bon numéro aux alentours de la gare. Je converse tant bien que mal avec une cycliste en Allemand (et oui, me voilà à nouveau en suisse allemande!) qui m’explique que le chemin commence à la prochaine gare, deux cent mètres plus loin.
Je m’élève lentement au-dessus du lac de Constance pour rejoindre les Alpes. Cette partie là de l’itinéraire est relativement « monotone », c’est plein de petites villes et il n’y a pas le même charme que dans le Jura ou les parties vraiment plus montagneuses des Alpes. Je me sens légèrement fatiguée, j’ai les jambes lourdes et contrairement aux autres fois je ne suis pas en pleine forme! Par contre, mon vélo est passé aux bons soins du magasin de vélos Jordan Cycles et après des réparations sur mon vélo et quelques réglages par rapport à ma morphologie, je n’ai plus de douleurs aux genoux! Un gros souci de moins!
Néanmoins je ne suis pas à mon affaire et je sens que j’ai de la peine à me concentrer. Lors d’un déclipage un peu délicat dans une descente, pour passer un petit portail, je perds l’équilibre et tombe à moitié contre les fils électriques des vaches qui m’envoient de sacrées secouées! Me voilà bien réveillée 😉
Je rejoins une forêt. Ponctuellement, il y a de fortes rafales de vent qui font tomber les branches des arbres, et je vois que même de petits arbres sont en travers du chemin. Je ne suis pas rassurée, on n’est jamais à l’abri d’un arbre au tronc pourri qui se casse sous l’effet de la force du vent. Je commence à ce moment-là à me poser des questions sur la suite de l’itinéraire, le but étant de ne pas prendre de danger inutile! Sur l’autre versant néanmoins, je suis protégée de la bise. Les chemins sont par contre extrêmement boueux et sur un petit sentier bien raide, mon vélo dérape et je perds l’équilibre avec un sacré vol plané à la clé! Heureusement à part quelques hématomes je n’ai rien, ouf!
Le ciel vire au noir d’encre. Un coup d’œil sur les montagnes (dans le brouillard et sous de gros nuages qui ont pas l’air gentils…) de la suite de mon itinéraire m’invitent à la plus grande prudence. Je m’arrêterai déjà à Appenzell aujourd’hui, pas question de m’aventurer fatiguée dans des conditions météo difficiles sur des terrains glissants, alors que je suis seule et qu’il n’y a absolument aucun promeneur avec un temps pareil (à part quelques-uns de mes amis les plus fous mais ils se baladent pas dans la même région 😉 ).
A Appenzell, le défi est de trouver un toit pour la nuit. En effet, vu les grosses quantités de pluie qui étaient annoncées, j’ai décidé de ne pas prendre ma tente mais uniquement mon matelas de sol et mon sac de couchage et de me débrouiller sur le tas pour trouver une grange ou un abri où passer la nuit. Par pure curiosité, je passe à l’office du tourisme et je demande le prix d’une nuit à l’hôtel le moins cher… 100 euros! J’explique à la dame que je recherche juste un endroit au sec, mais que je n’ai pas besoin de lit, l’idéal étant un tas de foin ou de paille sur lequel je puisse dormir (ça garde un peu chaud). Son visage s’illumine d’un coup et elle m’indique une petite ferme à un peu plus de 5 kilomètres.
Après une petite visite du joli petit village d’Appenzell je remonte alors sur mon vélo et rejoins Wasserauen. Un paysan et son fils m’accueillent les bras ouverts. Ils m’indiquent la grange avec la paille où je vais pouvoir dormir, la douche annexée à l’étable qui est dans un autre bâtiment et la petite cuisine rustique, charmante et simple où ils allument le fourneau pour que mes habits puissent sécher. Ils m’expliquent qu’ils ont deux fermes et qu’ils vont passer la nuit à l’autre ferme mais qu’ils reviennent le lendemain matin me voir pour le petit-déjeuner. Je les remercie infiniment pour leur hospitalité et leur confiance! Dehors c’est un déluge, heureusement que je me suis arrêtée là! Après la douche qui me réchauffe, mes habits étendus à sécher, je m’endors déjà à 20h30 blottie dans mon sac de couchage sur le tas de paille.

Lundi 8 mai 2017: 35 kilomètres, 1500m D+
Je me réveille après dix heures de sommeil réparateur, en pleine forme. Un petit passage au toilettes me dit que le jour précédent j’étais probablement fatiguée en raison d’un petit virus qui est passé par là. Je ne vais pas faire de dessin, je pense que vous avez compris 😉
Mon hôte vient accompagné de sa femme. Ils ont amené plein de produits frais de leur ferme: du lait de leurs vaches, les confitures qu’ils ont préparées, le pain du boulanger. Je leur explique avec mes quelques connaissances d’Allemand (mais je m’améliore quelque peu chaque week-end, je ne désespère pas de maîtriser un jour cette langue hehehe) que je préfère largement leur petit-déjeuner fait de leurs propres mains que celui d’un hôtel, fait de produits industriels!
Je me régale et je prends le départ. Il pleuvait des cordes et voilà que tout s’arrête. La chance! J’ai retrouvé l’entier de ma forme et je monte le premier col en un rien de temps. Le paysage est maintenant très alpin, il me donne des frissons de bonheur. Plus c’est grandiose, rustique et sauvage, plus j’aime, plus ça me fait vibrer. Je redescend à toute allure de l’autre côté et je me retrouve à un croisement. Les panneaux de signalisation ont été tournées et pour me situer, j’hésite entre deux points sur la carte. A mes côtés il y a un énorme bâtiment avec un parking où quelques voitures sont stationnées. Je décide d’aller quémander de l’aide à l’intérieur.
Je rentre, boueuse et avec mon VTT que je roule à côté de moi, dans un long couloir luxueux, en marbre, où les lumières s’allument au fur et à mesure. Il y a un ascenseur au bout, et rien d’autres. C’est complètement irréel d’arriver dans un bâtiment comme ça au milieu d’un paysage autant sauvage. Sur le panneau il est indiqué: 1er étage, restaurant, 2ème étage réception spa. Je me décide pour le restaurant, car au vu de la boue que je laisse sur mon chemin je ne pense pas être bien accueillie au spa!
1er étage. Les portes s’ouvrent et un monsieur me dévisage, hilare. Il éclate d’un grand rire et me lance une tirade en suisse-allemand à laquelle je ne comprends rien! Je lui montre l’itinéraire que je souhaite faire sur ma carte et il m’explique le chemin à prendre. Il ne cesse de rigoler et me souhaite tout de bon pour la suite. Ouf, moi qui pensais que j’allais me faire enguirlander!
Je ressors du bâtiment en observant l’étendue de la terre et de la boue que j’ai mis un peu partout et j’envoie en pensée des mots d’excuse pour le personnel de nettoyage… Je reprends le bon chemin et après une chouette descente qui se passe sans souci, j’attaque le deuxième col à 1500 mètres d’altitude. La première partie de la montée se passe sans souci mais pour les derniers kilomètres, le chemin balisé pour les VTT passe juste sous les falaises du massif du Säntis et des coulées de neige tombent dessus devant mes yeux. Impossible de passer par là sans risquer inutilement ma vie! Je fais demi tour et rejoins le sentier de randonnée qui passe bien plus bas et est entièrement protégé des avalanches et des coulées de neige.
S’ensuit une dure et longue montée dans la neige mouillée, le vélo sur le dos. A chaque pas je m’enfonce profondément, car sous la neige c’est une sorte de marais! Le vent souffle à nouveau, il y a du brouillard et chaque pas dure une éternité. Je suis mouillée jusqu’aux os, il semblerait que ce type de condition devient une habitude sur mon périple! La pente est extrêmement raide, je glisse, je tombe, je me relève et je recommence. Le vélo est plutôt encombrant et malgré son cadre en carbone, le poids n’est pas négligeable, c’est pas facile de le gérer en plus du sac et du terrain difficile. Je mets 1 heure pour faire 100 mètres de dénivelé positif… Aïe aïe aïe! Ce qui ne m’empêche pas de chanter durant l’effort et d’y trouver du plaisir!
Finalement j’y arrive à ce col! De l’autre côté il y a une large route bétonnée et complètement dégagée! Les deux côtés du col sont diamétralement opposés et la descente se passe tout en douceur (je suis presque un peu déçue car je préfère descendre sur les sentiers… et monter par la route)
Je rejoins ainsi le petit village de Stein. Ce n’est que 13h et je m’arrête boire un thé avant de repartir à l’assaut du prochain col. J’ai un peu froid mais je ne me sens en pleine forme et prête pour la suite!
Tout en me réchauffant à la petite boulangerie (ça aussi, ça devient une habitude!), j’analyse la suite de l’itinéraire… Là je vois que le prochain col est à 1600 mètres d’altitude et risque donc d’être encore bien plus compliqué à franchir que le dernier! Il pleut de nouveau comme si c’était l’apocalypse et je m’imagine donc qu’en haut il doit neiger bien fort. De plus, si le chemin est exposé (risques d’avalanche ou autres), c’est presque inconscient de continuer! Je décide que je vais laisser la neige fondre quelque peu et que ce col attendra mon prochain week-end à VTT, qui sera exceptionnellement les 21 et 22 mai car ce week-end je suis avec Salomon en France dans le cadre de mon travail.
A bientôt pour la suite des aventures, en attendant, voici quelques images…
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