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La Suisse à VTT: étapes 3 et 4

Dimanche 30 avril 2017: 140 kilomètres, 2400m D+

Je saute sur mon vélo à 5h30 du matin et monte dans le train qui part à 6h, direction La Ferrière. Je reprends le parcours à travers le Jura juste après Saint-Imier, de manière à ne pas monter une nouvelle fois sur la même crête que la dernière fois. Une petite descente et une petite montée m’amènent très rapidement sur la Chaux-de-Fonds. Il y a de la neige parsemée sur les sentiers et je fais quelques acrobaties sur les montées un peu plus techniques pour ne pas tomber!

Le soleil est bien présent, il fait bon et je monte allègrement et aisément sur mon premier sommet qui surplombe la ville. Il y a plein de vttéistes sur les sentiers et je partage quelques kilomètres avec l’un d’eux. Je suis en pleine forme, et autant la distance que le dénivelé passent sans que je ne m’en aperçoive. J’ai légèrement remonté la selle de mon vélo ce qui me permet d’économiser déjà beaucoup plus mes genoux et j’ai laissé tente et sac de couchage chez moi car ce soir, c’est la tante de mon amie Maya Chollet qui m’accueille! Ils annoncent en effet de la neige pour la nuit et le lendemain et je ne veux pas prendre le risque d’une hypothermie.

Je longe un instant le Doubs et m’arrête quelques minutes pour admirer le magnifique saut du Doubs. Le paysage est splendide et je pédale comme dans un rêve.

Voilà que le chemin monte à nouveau, je passe en vitesse au Couvet et attaque la montée du Soliat ou un cadeau de taille m’attend au sommet: Le Creux du Van. C’est une formation calcaire qui forme un grand cirque majestueux. Avec le beau temps c’est plein de monde, dont certaines personnes (qui sont montées en voiture) en hauts talons, maquillées, parfumées… Après toutes ces heures de silence sur les sentiers, cette agitation me donne une sensation étrange. Je reprends assez rapidement mon chemin, que je perds, mais au lieu d’essayer de le retrouver, j’improvise de nouveaux chemins car je ne suis plus bien loin d’Yverdon-les-Bains, où Maya me rejoint pour un bon repas au restaurant et sa tante me loge ensuite. Je choisis des sentiers bien techniques pour la descente qui mettent à rude épreuve mes réflexes et mes petites mains (avec les chocs et le fait de freiner sans cesse) mais je ne tombe pas (miracle!)!

Les cinq derniers kilomètres semblent infinis et je suis bien contente de m’asseoir autour d’un délicieux repas avant de me glisser au chaud dans un vrai lit, accueillie comme une reine.

 

Lundi 1er mai 2017: 92 kilomètres, 1750m D+

Voilà l’aventure, la vraie. Je prends le train à l’aube et rejoins l’itinéraire que j’ai quitté à Sainte-Croix (et qui normalement ne descend pas jusqu’à Yverdon-les-Bains). Je reprends le sentier à 6h30 du matin, dans et sous la neige. Il neige fort, il y a du vent et je trace mon chemin tant bien que mal. La nature me récompense de tous mes efforts et presque à chaque virage je croise chamois, renards, chevreuils, biches, écureuils… Les animaux ont dû se dire qu’ils n’allaient jamais croiser un bipède aujourd’hui! Sur les hauteurs, il y a trop de neige pour pédaler. Je porte le vélo sur mon dos et le pousse, en alternance. Le vent est tempétueux, tout est gris, je trace mon chemin à travers la neige les pieds et les mains trempés et gelés. Je suis assoiffée aussi mais l’eau de mon bidon a gelé et je ne peux pas boire. Je n’ai qu’à manger la neige au pire… J’arrive malgré tout au sommet, à 1400 mètres et grimpe sur la selle de mon vélo pour la descente. Je suis étonnée que malgré la bonne couche de neige le vélo tient bien la route et je m’amuse comme une folle sur le sentier, seule au monde. Après la neige je traverse la grosse boue qui me gicle partout, de la tête aux pieds, qui s’enfile sous mes vêtements, dégouline dans mon cou, passe sous les manches… Il pleut à cette altitude, l’eau de mon bidon dégèle et je peux me désaltérer du liquide glacial.

Le froid est mordant et j’arrive à Vallorbe, au terme de ma descente, frigorifiée, le corps couvert de spasmes. Je n’arrive presque plus à tenir le guidon et je ressens des chocs électriques dans mes mains. Mes pieds sont comme des bouts de bois. J’alterne la marche et la course en poussant mon vélo pour me réchauffer. Mes dents claquent, mes muscles tremblent de froid, je n’ose même pas m’arrêter pour manger quelque chose dans mon sac. La nouvelle montée me réchauffe quand même quelque peu, de quoi manger quelques barres (merci Mulebar! 🙂 ), quelques pâtes de fruits, boire un peu. J’enlève mes gants quelques instants et je vois que mes doigts sont d’un rouge vif. Mes pieds, je ne les sens toujours pas. Je ne sais pas comment je vais faire pour enchaîner un deuxième col à 1450 mètres d’altitude dans ces conditions-là.

Je longe le lac de Joux jusqu’à Le Brassus, le petit village au pied du nouveau col qui m’attend. Je vois une petite boulangerie ouverte et me réfugie toute tremblante, boueuse, mouillée jusqu’aux os. Mon passage laisse de grandes flaques brunes par terre et je prie à la boulangère de m’excuser. Mes gants sont gorgés d’eau, mes habits sont autant mouillés du dedans que du dehors entre la transpiration, la pluie, la neige et la boue. La bonne femme prend mes habits, les met réchauffer au fourneau, me verse un thé chaud, remplit mon bidon aussi de thé. Je me rassasie avec deux croissants qu’elle me fait chauffer et elle m’en offre un troisième pour la route. Je pense que son accueil m’a autant réchauffée que la chaleur de la pièce et des délicieux mets et, après l’avoir remercié infiniment pour sa bonté, je repars presque sèche et bien réchauffée à l’assaut du nouveau col. Elle m’indique que la route a été dégagée, je choisis donc de monter le col par cette voie-là au lieu d’emprunter le sentier enneigé. La montée se passe sans encombre,, toujours sous la neige, même si malheureusement le thé se refroidit bien vite et mon corps aussi! J’arrive en haut et je m’abrite sous un auvent. Je mange le croissant qu’elle m’a soigneusement préparée, j’enlève les chaussures et les chaussettes détrempées et je frotte mes pieds entre mes mains durant une bonne demi-heure, jusqu’à ce que je retrouve un peu de sensibilité dans les orteils. J’ai prévu une paire de chaussettes sèches que je m’empresse d’enfiler et je reprends le sentier de l’itinéraire pour la descente.

Toute la première partie du sentier est complètement impraticable à vélo et je le pousse, les pieds dans la neige. En deux temps trois mouvements, mes chaussettes sèches ne le sont plus! Je regrette de ne pas avoir de couteau avec moi, qui m’aurait permis de couper des bouts de ma couverture de survie pour en envelopper mes pieds. Je remonte sur mon VTT un peu plus loin et j’attaque la descente. Le froid reste relativement gérable et je quitte la neige pour retrouver la boue, qui à nouveau me gicle, me mouille, me gèle. C’est alors qu’un déluge (au sens propre du terme!) s’abat sur moi. J’ai l’impression d’être sous la douche, il pleut des trombes d’eau! Mon corps a à nouveau des spasmes incontrôlables et je ne peux pas me réchauffer à la descente! J’arrive finalement à Nyon et je saute dans le premier train, direction la douche chaude et le lit!

Malgré l’aspect complètement aventureux de cette journée, j’ai adoré vivre une telle expérience! Je me sentais si petite face à la nature, c’était tellement incroyable de braver de telles conditions météo, et j’ai pu voir tant et tant d’animaux qu’au final, même si ça peut paraître masochiste, cela a sans doute été ma plus belle journée de ma traversée du Jura!

J’ai ainsi terminé la traversée du Jura en quatre jours au lieu des neuf qu’il faut habituellement, et le week-end prochain je me lance sur les Alpes, au départ de Rorschach!

creux du van
lac de Neuchâtel
Au-dessus de la Chaux de Fonds
Les chemins sont parfois quelque peu enneigés…
au-dessus de la Chaux-de-Fonds
Le Doubs
Creux du Van
Le saut du Doubs
creux du van
Un accueil chaleureux avec Maya et sa tante 🙂
à vélo au Suchet! 🙂 brrrrrrrr
en montant au Suchet
et hop le deuxième col est dans la poche!
le long du lac de Joux
Froid en haut dans la neige, froid en bas dans la pluie et la boue… Mais c’est ça aussi l’aventure! Sacrée journée!

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