Garder le (handi)cap
Vous êtes plusieurs à m’avoir demandé quels étaient mes objectifs de compétition pour 2016, pourquoi je ne donnais plus de nouvelles sur ma page facebook et sur le site internet… Après quelques temps de silence, me revoilà prête à écrire.
J’ai eu quelques complications au niveau de mon coeur et je ne peux plus participer à des compétitions durant un certain temps. Pour ceux qui se posent la question, l’aggravation de l’état de mon coeur n’est pas liée à mes efforts physiques qui peuvent paraître extrêmes pour certains d’entre vous, au contraire, ils m’ont permis de garder un coeur bien fonctionnel par rapport aux images données par les échocardiographies et irm qui démontraient des problèmes sévères. Je peux néanmoins continuer quelques temps à m’entraîner en endurance à faible intensité.
Il faut savoir que ma maladie du collagène, le syndrome d’Ehlers-Danlos ou SED (plus d’info ici), n’est pas responsable de mes problèmes cardiaques mais que ceux-ci proviennent d’une deuxième maladie, une malformation qui touche la valve aortique et mon aorte. Le sang part du coeur (plus exactement du ventricule gauche) et est ensuite envoyé dans le corps par un vaisseau qui s’appelle l’aorte. Pour éviter que le sang ne revienne dans le coeur, une valve composée de trois parties se ferme. Sauf que chez moi elle n’a que deux parties et un bon pourcentage de mon sang reflue dans le coeur au lieu d’être envoyé dans le corps. Dans un premier temps, le coeur s’adapte et arrive à compenser en partie ce problème en se dilatant pour pouvoir pomper plus de sang. Ensuite, on commence à voir des signes de fatigue car il n’arrive plus à suivre. Je me situe entre ces deux étapes. De plus mon aorte est dilatée (anévrisme aortique) et donc fragilisée au niveau des parois, encore plus avec mon SED. L’effort en intensité induit une forte pression sur ces parois qui sont déjà fragilisées… Continuer de faire des compétitions dans l’état actuel serait stupide tant le risque d’accident cardiaque est grand, même si ça a été une nouvelle très difficile à avaler. J’ai eu l’impression d’avoir échoué à quelque part, que malgré tous mes efforts pour vivre le plus normalement possible, pour me battre, mettre tout mon courage pour rester optimiste, la maladie avait fini par me rattraper. Après quelques temps pour me remettre de ces émotions, je me suis rendue compte que malgré tout ça, j’ai énormément de chance. J’ai des médecins de pointe qui me suivent et qui essaient au maximum de concilier mes passions avec mes problèmes de santé, un accès illimité aux soins, des amis en or, un job que j’adore, je peux courir, pédaler et je pourrai peut-être même retourner à la compétition!
Quand je pense à tous ces enfants qui sont atteints de maladies très dures, qui subissent des chimio, des opérations à répétition, de ceux qui habitent dans les pays du tiers-monde et qui n’auront pas accès aux soins, de tous ces gens qui ont leurs jambes amputées, ou qui traversent la maladie seuls… je me dis que je n’ai pas le droit de me plaindre. En fait, je suis reconnaissante à la vie et à mon entourage de m’avoir offert toutes ces magnifiques choses et ces moments paradisiaques (et ce n’est pas fini!).
Merci à vous 🙂
J’en profite pour rendre hommage à un p’tit gars qui s’est battu jusqu’au bout et qui nous a quittés il y a quelques jours, bon voyage au pays des étoiles Marouane
Décembre 2015: submergée par l’émotion, arrivée de ma dernière course avant un bout de temps.